Que tu aies une autre langue, maternelle, est secondaire. La frustration paralyse et monte des barricades sociales. L'etiquette est collee a ton front, comme la misere l'est a ton intellect. Different, tu es different. Tu es le francais, la polonaise, l'espagnole, le russe, la chinoise ou la pakistanaise. Tu es celui qui reagit trop tard aux amuseries generales - apres un check sur le net ou un remise a niveau par un altruiste compatissant. Tu es celui qui ne connait pas untel ou unetelle, l'actualite ou les patois familiers du coin. Tu es celui qui acquiece en souriant devant l'incertitude du vocabulaire, celui qui ne parle pas de peur de s'afficher, le reserve qui se met en retrait pour mieux observer et essayer d'apprendre toujours un peu plus. Mais il y a ces moments qui sont de trop, ces sensation qui font que tant d'efforts pour paraitre "normal" sans ne jamais pouvoir y arriver sont les derniers espoirs de lucidite. C'est etre en trop, absent, ailleurs et en retard. Et se sentir intimement bete et d'une debilite profonde, car dans l'incapacite de s'exprimer librement avec tact, sens et sensibilite. C'est etre a fleur de peau car prisonnier dans sa carcasse et handicape socialement. Et continuer de sourire en ayant l'air stupide, silencieux.
J'aime tellement.